novembre 25, 2006

Morre o ator francês Philippe Noiret

Noiret, un demi-siècle de talent et d’éléganceBRIGITTE BAUDIN et DOMINIQUE BORDE. Publié le 23 novembre 2006Actualisé le 24 novembre 2006 : 07h58 L’acteur Philippe Noiret s’est éteint, jeudi, des suites d’une longue maladie.
(AFP/F. Guyot)


L’acteur Philippe Noiret s’est éteint, jeudi, des suites d’une longue maladie.
(AFP/F. Guyot).
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Nahed Ojjeh, courte romance pour l'Art déco L'«art sauvage» sauvé par les surréalistes Joséphine Baker revient à Paris Retour | Rubrique CultureIl s’est éteint hier à l’âge de 76 ans après cinquante ans de carrière. Plus de cent vingt films, des dizaines de pièces de théâtre avaient fait de lui un des acteurs les plus populaires de France.



« Je ne vais jamais au-devant d’un rôle expliquait-il. J’attends qu’on me propose. Cela présente deux intérêts : la jubilation de jouer ce que les autres attendent de vous et une occasion de juger lucidement où l’on en est. »


Acteur, Philippe Noiret l’était jusqu’au bout des ongles, mais il aimait aussi rêver en contemplant la nature. « Je suis le plus heureux des hommes le nez au vent avec un livre à la main assis sur un banc, au soleil, dans mon jardin ou en train de galoper sur un de mes chevaux. Ma vie est un savant équilibre entre la nature et ma vie parisienne. » IL AVAIT L’ALLURE d’un hobereau de province avec ses costumes en tweed, ces pulls en cachemire, ses gilets en soie, ses chaussures faites sur mesure et ses pochettes bouffantes. Une voix profonde, reconnaissable entre toutes, des gestes élégants, un éternel cigare aux coins des lèvres, il cultivait son image d’élégant d’un autre siècle. Pour plaire, mais aussi pour se plaire. C’est son père, vendeur dans la confection, qui lui donne le goût des beaux vêtements, des étoffes luxueuses et surtout des mots


« Mon père était un lettré avouait- il. Il aimait la poésie, la littérature. Ses auteurs de chevet étaient Verlaine, Rimbaud, Montaigne, Montesquieu. » Né le 1er


octobre 1930 à Lille, il grandit à Paris. Il n’aime pas les études. Il va d’abord chez les oratoriens puis au lycée Jeanson- de- Sailly. Il se fait renvoyer de tous les établissements. Un peu plus tard, il fréquente les cafés de Montparnasse. Il se lie avec des artistes, des comédiens. C’est là que naît sa vocation théâtrale. Il a 24 ans. Commence alors pour lui la grande aventure du TNP avec Jean Vilar où il jouera au côté de Gérard Philipe et de Monique Chaumette qui deviendra son épouse. Après une expérience de duettiste avec Jean- Pierre Darras dans les cabarets, il débute au cinéma.


L’oncle de Zazie


Pour lui le cinéma n’aurait pu être qu’un accident. Venu du TNP avec le physique enveloppé et confortable d’un bon gros à l’allure un peu snob, il n’avait pas le physique d’un premier rôle. En 1956, à 26 ans, il est dans le premier film d’Agnès Varda comme une apparition symbolique. Plus audacieux, Louis Malle en fait l’oncle de Zazie dans le métro, il est Hercule dans une version du Capitaine Fracasse aux côtés de jean Marais ou un Louis XIV emphatique dans Les Amours célèbres. Mais rien ne le détache de ses premiers duos avec Darras. Il faudra le Thérèse Desqueyroux de Franju, inspiré de Mauriac en 1962, Les Copains d’Yves Robert, tiré de Jules Romain pour qu’on remarque la finesse du comédien qui, au- delà de son allure pataude, sait imposer une sorte d’élégance innée.


Avec La Vie de château de Rappeneau, qui signe son premier film et en fait le mari d’une Catherine Deneuve évéenne et fantaisiste, il franchit un degré. Du coup, le cinéma devra compter avec celui qui se trouvait une « allure de pachyderme ». On s’habitue à cet ours pas trop mal léché qui sait jouer de ses fausses naïvetés ou de sa calme assurance pour entrer d’un bloc dans un personnage. Qu’Yves Robert en fasse le délicieux paresseux d’Alexandre le Bienheureux, qu’Hitchcock le transforme en espion soviétique pour L’Étau, qu’il soit Clérambard ou une barbouze dans L’Attentat de Boisset qui romance l’affaire Ben Barka, le « pachyderme » est d’abord un étonnant caméléon.


Bon nounours ou trouble-fête


Et c’est lui encore qui permet à Bertrand Tavernier de signer ses premiers films, L’Horloger de SaintPaul, Le Juge et l’Assassin, Que la fête commence. Lui aussi qui a l’audace avec l’ami Piccoli ou le copain Mastroianni de fréquenter l’infréquentable Marco Ferreri et ses provocations sulfureuses ( La Grande Bouffe). Mais ne peut- il pas tout se permettre ? De faire le pitre avec Mes chers amis de Monicelli, d’être l’un des officiers du Désert des Tartares, le vengeur exterminateur, mari d’une pathétique Romy Schneider pour le célèbre Vieux Fusil qui restera l’un de ses films les plus populaires, ou l’amoureux respectueux de Charlotte Rampling dans Un taxi mauve.


D’une adaptation de Drieu La Rochelle, Une Femme à sa fenêtre, à celle d’un Simenon ( L’Étoile du Nord), Noiret devient le comédien incontournable et interchangeable des années 1970. Du comique des Ripoux ou de Twist again à Moscou à la gravité de La Vie et rien d’autre ou le peu connu Les Lunettes d’or où il joue un homosexuel, il est sur tous les fronts, bon nounours ou vilain trouble- fête, notable ou anarchiste. Un seul rôle lui échappe dans lequel il aurait pu se couler aisément, celui de Maigret, devenu propriété de la télévision à l’époque avec Jean Richard. Jusqu’au bout, entre un Ripoux 3 où il semble se parodier et Père et fils de Michel Boujenah où il compose un paternel malicieux et émouvant, Noiret aura répondu présent au cinéma.


C’est cet homme élégant et ce comédien doué qui excusait ses coquetteries vestimentaires et son goût du confort en disant de la vie : « Le voyage est court autant le faire en première classe ! » Le voyage est fini, il nous laissé sa classe.

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